Je suis non essentiel, tu es non essentiel, nous sommes non essentiels.
Ce deuxième confinement est moche. Il n’a pas la fantaisie de surprendre du premier.
Pire, il nous révèle notre… non essentialité. C’est fâcheux !
J’étais superfétatoire et je l’ignorais. Je n’avais pas non plus la prétention d’être absolument vital. Mais, j’avoue, il m’arrivait de me sentir utile en donnant du plaisir, des émotions, en suscitant des questions, en bousculant l’ordre établi, en contrariant le conformisme. Quelle méprise ! Quelle aveuglement ! Quelle vanité !
Me voilà relégué au statut de babiole, de broutille, d’enfantillage, de bricole, de fanfreluche, de frivolité, d’inanité, de puérilité…
Interdiction de jouer ! Terminé les projecteurs, les applaudissements. Je redescends de mon piédestal. Je dégringole ! Je tombe dans un coma profondément injuste. Le tunnel, la lumière bleue. La petite mort du spectacle vivant qui rôde. Les planches qui sentent le sapin. Une odeur de néant, de ténèbres.
Et puis, l’instinct de survie, l’entêtement à ressusciter. Se convaincre que ce n’est pas la mort, que nous nous reposons pour mieux nous réveiller regorgeant de vitalité, prêts à croquer la vie et nous donner en spectacle. Avec la volonté de jouer, de créer, de partager, de se poiler, d’aller à rebrousse poil, de faire chier, de raconter le monde… A défaut d’être essentiels, l’envie et l’arrogance d’être merveilleux, remarquables et généreux. Titus